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Yazının Türkçe versiyonu:Bizim Göç Hikayemiz...
Elle a maintenant cinquante ans, la migration, et elle se porte plutôt mal. Elle semble soumise à une ‘obligation économique’ qui la fait agir et s’agiter de manière tantôt cocasse, tantôt tragique. Comme si l’existence même des migrants dépendait de leur réussite sur le plan exclusivement économique ; comme si l’avoir de biens matériels primait largement sur ‘l’être qui on est’, vouant ceux qui s’enrichissent seulement matériellement à une forme d’esclavage et à la solitude émotionnelle.
Car, en effet, je constate avec tristesse que persistent au sein de la communauté belgo-turque des préoccupations d’ordre principalement économiques, et cela aux depens de l’épanouissement personnel, ce qui plonge ‘ceux de cette communauté dont je fais moi-même partie’, dans une détresse psychologique qui va grandissante. Cette détresse se transporte, se transferre d’un individu à l’autre et d’une génération à l’autre, comme le ferait une dette qui jamais ne pourra être soldée.
Et cela a lieu au détriment du développement personnel en toute quiétude des jeunes générations qui voient leurs aspirations personnelles confrontées aux complexes constitués principalement de ces devoirs/dettes envers on ne sait plus trop qui ou quoi, augmentées de la culpabilité et des traumatismes dont l’origine peut être retrouvée dans les générations antérieures. Il y à là ‘transmission transgénérationnelle’ des douleurs et frustrations vécues par les aïeux, par ces ‘émigrants’ qui entamèrent ce voyage sans retour … Qui n’est apparemment toujours pas terminé!
Ce processus psychique, qui s’opère inconsciemment, nous influence au quotidien dans nos représentations du réel et dans nos choix de vie. Il en va ainsi des ‘traits névrotiques’ qu’accuse ma maman, du ‘sentiment d’échec’ de mon papa, de ‘l’animosité ambiante’ vécue par mon grand-père, de ‘la tentative de suicide’ de ma tante, du ‘sentiment d’humiliation’ de mon oncle, du ‘traumatisme maternel’ de mon arrière-grand-mère, de ‘la disparition bouleversante’ du village de mon arrière-grand-père … Et j’en passe! Bref, nous sommes dépositaires d’une multitude de traces, de traumatismes, d’espoirs parfois, mais surtout de tragédies inscrites dans notre ‘génogramme’!
Cet ‘héritage poignant’ fonctionne tel un ‘karma’, tel un devoir confiant ‘une drôle de mission’ à ceux qui veulent s’en libérer, dès lors qu’il s’agit de ‘guérir’ les générations à venir des vestiges toxiques de leur passé. Et il apparaît que ‘le facteur économique’ entrave le processus naturel des transmissions intergénérationnelles harmonieuses, quand bien même il donne l’illusion que c’est la prospérité économique seule que ‘règlera l’affaire’, qui apaisera les douleurs sourdes que nous transportons partout et transmettons sans nous en rendre compte!
Afin de nous défaire de ce ‘lest’, il convient d’abord de l’identifier. Je pense ainsi aux ménages modestes qui ont dépensé des fortunes en cérémonies de mariage prestigieuses autant qu’exagérément coûteuses; à ceux d’entre nous qui se sont endettés jusqu’au cou pour pouvoir se rendre dans leur pays d’origine au volant d’une voiture de luxe, attestant de ‘leur réussite’; aux nombreux investissements immobiliers dépassant de loin la capacité à ‘les porter sans avoir à en souffrir par ailleurs’. Vous remarquerez que tous mes ‘exemples’ sont ‘de nature économique’ et que ces ‘tentatives plus ou moins bien réussies en apparence’ placent très rarement ‘l’individu’ au centre de ‘ce qui importe vraiment pour lui.elle’ … Ce qui fait que ceux qui le tentent s’y perdent le plus souvent!
Bref, et j’y reviens, question d’enfoncer le clou … Pendant que ‘notre individu hyperactif d’un point de vue économique et matériel’ agissait ‘avec grande industrie’, afin de se libérer et de soulager ses proches d’un poids trop grand pour lui comme pour eux, en fonçant vers l’avant sans avoir le loisir de prendre garde à ce qui se passait autour de lui … Des jeunes filles et des jeunes garçons furent les victimes de mariages forcés ; des enfants naissaient en situation de handicap ; d’autres souffraient de symptômes psychotiques ; d’autres encore se suicidaient, etc. … Comme s’ils signalaient une carence du ‘système’!
… ‘On’ s’est alors tu, ‘on’ s’est arrangé pour ne pas les voir, ‘on’ en a eu honte! Bref, le déni dans toute sa splendeur ‘nous’ a gagné! Comme si c’était ‘le prix à payer’ pour … On ne sait trop quoi! Or, ce sont ces histoires ‘transgénérationnelles’ qui auraient dû être investies dans l’espoir d’une ‘purification intergénérationnelle’! On ne l’a pas fait, pas suffisamment en tout cas. Mais il est impossible de revenir sur ses pas, tout comme il est inutile d’y ajouter la culpabilité … D’autant qu’il n’est pas trop tard pour ‘rectifier le tir’! Comment cela? En nous rendant compte qu’aujourd’hui nous possédons de grandes maisons dont les chambres isolent les individus; que nous possédons des autos de grandes marques qui nous véhiculent dans un cocon somptueux comme les carrosses des fées d’antan …
… Alors que nos grands-parents n’avaient, le plus souvent, comme seul projet que celui d’habiter une maison modeste, de posséder une voiture utilitaire; et qu’ils rêvaient surtout d’un retour au pays ‘des origines’ … Un pays devenant ‘mythique’ à mesure que passait le temps, dès lors qu’il changeait lui-aussi! Et quand bien même nos ‘besoins’ ne sont plus ceux de nos ancêtres, il reste qu’il est évident que nous avons perdu le fil de nos ‘besoins authentiques’, que nous nous sommes égarés dans les artifices et les paillettes aveuglantes les masquant habilement! Mais un masque, ne l’oublions pas, n’est toujours qu’un pauvre accoutrement, un faux-semblant qui nous cache pudiquement ‘le réel’ … Notre ‘vraie’ condition existentielle!
Cher lecteur, chère lectrice, je viens ainsi de vous partager des ‘pensées sombres’, mais je suis néanmoins porteuse d’une ‘Bonne Nouvelle’ qui, je l’espère, apparaissait discrètement à votre entendement entre les lignes de ce petit texte. Car, en effet, l’oeuvre de nos parents et la nôtre ne fut pas vaine dans la mesure où nous nous sommes, en quelque sorte, guéris de la pauvreté matérielle, ce qui n’est pas rien! Et, que cela se soit passé au détriment d’une autre pauvreté, émotionnelle celle-là, n’est pas agréable à entendre, j’en conviens. Mais cette carence n’est en rien une fatalité! Que faire pour s’en sortir? Ben, je crois que, dans l’immédiat, il conviendrait de se mettre à la couture, question de ravauder sans attendre notre capacité émotionnelle à être indulgents, tolérants, partageants et, surtout, aimants fût-ce pour nous-mêmes et ceux qui nous sont proches!
Que vous dire d’autre sinon que c’est regagner vivement ces ‘qualités d’être’ là que je nous souhaite à tous!